Changement climatique et hydropériode des mares : un impact insoupçonné pour les amphibiens
L’observation de jeunes amphibiens métamorphosés au printemps signifie que la reproduction a fonctionné et que la population est pérenne. En général, les larves restent entre deux et trois mois dans l’eau avant la métamorphose. Chez beaucoup d’espèces, le temps de développement larvaire peut être réduit et la métamorphose accélérée en cas d’assèchement rapide de la mare. Ce processus physiologique permet aux jeunes individus de survivre à des évènements de sécheresse inopinés. Cependant, une récente étude nous éclaire sur l’effet négatif d’une hydropériode* trop courte sur la dynamique des populations. Une équipe de chercheurs américains a en effet montré que chez Rana pipiens, une grenouille des zones tempérées d’Amérique du Nord, une hydropériode réduite induit des effets en cascade sur plusieurs paramètres démographiques importants pour la survie des populations (Brannely et al. 2019). Les larves qui se développent dans des mares qui s’assèchent rapidement ont une plus petite taille à la métamorphose, et voient leur taux de survie réduit en comparaison aux jeunes métamorphosés dans des mares avec une hydropériode plus longue. L’assèchement rapide de la mare induit également un taux de survie supérieur pour les mâles. Enfin, les défenses immunitaires des jeunes métamorphosés dans les mares à hydropériode courte sont réduites, à cause d’un épiderme plus fin, les rendant plus sensibles aux maladies infectieuses. Ainsi, chez certaines espèces d’amphibiens, l’observation de métamorphes au printemps n’est pas suffisante pour garantir l’efficacité des mares et s’assurer de la survie à long terme des populations. L’hydropériode est importante, et doit être prise en compte dans les recommandations de gestion des mares pour les amphibiens.
*durée de mise en eau d’une mare
Brannely L.A., Ohmer M.E.B., Saenz V., Richards-Zawacki C.L. (2019). Effects of hydroperiod on growth, development, survival, and immune defenses in a temperate amphibian. Functional Ecology, 33 (10): 1952-1961.